[Vidéo] « Artistes-auteurs et autrices : Vivre de sa création, tous les espoirs sont-ils permis ? », Paris, 2019

La Fraap a organisé le séminaire « Artistes-auteurs : Vivre de sa création, tous les espoirs sont-ils permis ? » à la Cité internationale des arts, à Paris, le 24 octobre 2019

Publié en ligne le et mis à jour le .

Un grand merci à Lionel Maurel et Gaëlle Ferval pour leur aide précieuse à l’organisation de cet événement.

PRESENTATION DE LA TABLE-RONDE :
La création artistique est un défi pour les notions communes de “profession” et de “travail” parce qu’elle est dissociée d’un revenu immédiat et proportionnel au temps de travail. La moitié des artistes auteurs affiliés se partage moins de 10% de l’ensemble des revenus, tandis que les 10% d’artistes auteurs les mieux rémunérés concentrent à eux seuls plus de la moitié de ces revenus. Etre artiste auteur recouvre donc des réalités très contrastées dont les deux pôles extrêmes sont, d’une part, un très petit nombre d’artistes auteurs parvenant à vivre largement de leur activité artistique et, de l’autre, une population nombreuse dont les revenus tirés de leur activité d’artiste auteur sont faibles.
Source : CAAP : http://caap.asso.fr/spip.php?article282

Quel avenir les artistes-auteurs peuvent-ils imaginer pour sortir de la précarité ? Sur quoi s’appuyer pour mettre en oeuvre ce qu’il serait permis de croire ?
Quelles modalités de redistribution collective et solidaire pourrait-on imaginer, pour tous les artistes-auteurs et à l’échelle du secteur des arts visuels ?
Y a-t-il une solution dans le droit commun, qui apporte des éléments de définition de l’activité artistique de manière disparate, puisant tant du côté de la propriété intellectuelle (la création comme propriété) que du code de la sécurité sociale (l’artiste comme professionnel) ?
Peut-on puiser dans l’histoire du droit d’auteur et des politiques culturelles, des apports ou des pistes de réflexion ?

Le libre est-il une opportunité pour les artistes-auteurs ? Y a-t-il un espoir dans le salariat ? Le salaire à vie est-il une expectative prometteuse ?
Quelle place fait-on aux désirs de changement et aux nouvelles perspectives ?

Cette table-ronde propose un débat de fond entre le réseau salariat, la quadrature du net, les promoteurs d’un salaire à vie, sociologues et organisations professionnelles maîtrisant les particularités du statut pour penser les conditions d’une digne rémunération des artistes-auteurs et en permettre la réalisation effective.

Intervenants :

  • Lionel Maurel (La quadrature du net)
  • Laëtitia Bourget (CAAP - Comité pluridisciplinaire des artistes-auteurs.trices)
  • Aurélien Catin (La Buse / Réseau Salariat)
  • Patrick Cingolani (sociologue)

Quelques lignes rédigées par les quatre intervenants pour mieux présenter leur propos à venir :

Lionel Maurel :
Il y a dix ans, dans le sillage des débats autour de la loi Hadopi, la Quadrature du Net, association de défense des libertés dans l’environnement numérique, avait fait des propositions pour instaurer un nouveau mode de financement mutualisé pour la création, baptisé « contribution créative ». S’inspirant du modèle de la licence globale, tout en présentant des nuances substantielles, cette idée consistait à prélever un somme forfaitaire mensuelle dans tous les foyers connectés en Internet pour financer les créateurs et à légaliser le partage des œuvres sur Internet entre individus et dans un cadre non-marchand.
Cette proposition a fait couler beaucoup d’encre, concernant sa faisabilité technique, son impact sur les industries culturelles, les modes de répartition à envisager ou ses retombées sur l’équilibre entre les créateurs professionnels et amateurs. L’idée sous-jacente portée par l’association n’était pas seulement de mettre fin à la « guerre au partage », mais aussi de se doter d’un nouveau levier pour repenser le financement de la création à l’heure d’Internet.
Si aujourd’hui, l’idée de la contribution créative est passée au second plan, elle reste toujours pertinente par les questions qu’elles posaient. Internet s’est depuis recentralisé et plateformisé au profit de quelques acteurs géants, qui sont devenus incontournables pour la diffusion des œuvres et qui, à l’image de YouTube, rémunère les créateurs sur la base de partage de recettes publicitaires, soulevant de nombreuses questions.
Où en serions-nous aujourd’hui si la légalisation du partage et la contribution créative avaient été votées ? Cette voie aurait-elle permis de mieux soutenir les pratiques de création dans l’espace numérique tout en constituant un vaste ensemble de Communs culturels partageables ?

Laëtita Bourget
Laëtitia Bourget est plasticienne depuis 1997.
Polyvalente, elle a exploré un éventail plutôt large de formes artistiques (et de situations professionnelles associées), à la fois dans le domaine des arts plastiques, de l’audiovisuel et de la littérature jeunesse.
Elle est membre du CAAP (Comité Pluridisciplinaire des Artistes-Auteurs et Autrices) depuis 2003. Et à ce titre, elle accompagne ses pairs sur les problématiques de profession, et les représente au sein de différentes instances de concertation.
Son engagement dans la recherche de moyens pour améliorer les conditions professionnels des artistes, l’a conduit en 2007 à prendre part à la création de Smart en France, société coopérative d’intérêt collective, dont elle a été administratrice jusqu’en 2015. Cette expérience n’ayant pas permis de répondre à ses objectifs, la moindre, voire l’absence de rémunération de l’activité artistique étant au coeur de toutes les difficultés, elle s’investit de surcroit en tant que représentante syndicale, et milite pour une évolution des usages, afin d’associer les artistes aux bénéfices de leur travail de manière plus équitable. C’est ainsi qu’elle s’investit en 2018 dans l’émergence de devenir.art, réseau des arts visuels de la région Centre-Val de Loire, premier réseau qui réunit aussi bien des artistes que des intermédiaires, des personnes physiques que des personnes morales, afin de favoriser la coopération interprofessionnelle.

Patrick Cingolani :
L’indépendance des plasticiennes plasticiens a des effets paradoxaux. Leur travail quelle qu’en puisse être la durée ou l’intensité s’identifie avec l’œuvre réalisée et les conditions de paiement de l’œuvre souvent ne suffisent pas pour vivre, engageant un travail « alimentaire » en parallèle ou en intermittence - minant parfois d’autant l’activité artistique. On s’interrogera sur les conditions de socialisation et d’auto-organisation des plasticiennes et plasticiens et sur les conditions de reconnaissance de leur travail au-delà de l’œuvre. Comment allier l’indépendance à des formes de socialisation et de mutualisation des ressources ?

Aurélien Catin :
Au sein du collectif La Buse, je milite pour que les artistes-auteurs bénéficient des avancées sociales obtenues au profit des travailleurs : présomption de salariat, intermittence, sécurité sociale, etc. Les thèses portées par l’association Réseau Salariat, qui promeut un salaire attaché à la personne et non à la tâche ou au poste de travail, sont une source d’inspiration pour questionner les modes de validation et de rémunération du travail artistique. Je mène mes réflexions sur la base d’une lecture critique de nos droits patrimoniaux, l’enjeu étant de passer de la défense d’une propriété à la libre organisation du travail artistique.

Nous tenons à nous excuser pour le piètre rendu de l’intervention de Lionel Maurel qui a été particulièrement pénalisée par des travaux.

Document à télécharger #

Séminaire-FRAAP-FPH-24octobre2019