Présidentielles 2007 : réponse de Dominique Voynet au courrier de la Fraap

Publication-réponse au courrier de la Fraap aux candidat(e)s à l’élection présidentielle 2007 : réponse de Dominique Voynet, candidate des Verts.

Publié en ligne le et mis à jour le .

Paris, le 13 mars 2007

Cher Monsieur Antoine Perrot

Je tiens tout d’abord à vous remercier de la qualité du travail que mène la Fraap depuis quelques années pour structurer et fédérer un réseau qui est né de nouvelles pratiques artistiques associatives, militantes et souvent plus solidaires. Vous conduisez de front une analyse sur les principes de fonctionnement et les aspirations de vos adhérents, tout en esquissant les premières propositions qui permettront de faire évoluer la reconnaissance de votre Fédération face aux institutions culturelles et aux pouvoirs publics.

Cette démarche a effectivement mis en lumière que les politiques culturelles en faveur des arts plastiques et visuels ne prenaient en compte que les réseaux institutionnels bien établis.
Il me semble en effet que l’État s’est attaché à « mailler » le territoire d’institutions prestigieuses comme les FRAC, sans se poser quelques questions qui me paraissent essentielles :

  • Comment garantir à des plasticiens un minimum de sécurité « professionnelle » ou de protection sociale pour leur donner du temps pour chercher et pour créer ?
  • Comment permettre à davantage d’artistes de se professionnaliser alors que des revenus aussi légitimes que leurs droits d’auteurs sont souvent ignorés - comme le droit de présentation auquel vous faites allusion - ?
  • Comment réussir une démocratisation des arts sans valoriser la proximité des œuvres, sans rapprocher les artistes des citoyens ou sans engager les citoyens eux-mêmes dans des pratiques culturelles enrichissantes ?
  • Comment développer un « terreau » favorable à ces échanges sans prendre en compte les besoins les plus élémentaires d’ateliers, d’ateliers-logements et d’espaces de rencontres - je pense en particulier que la multiplication des squats artistiques révèle cette absence de réflexion - ?

À ces questions, quelques collectivités se sont efforcées de trouver des réponses et je suis tout à fait favorable aux développements des politiques culturelles locales, elles sont un échelon très juste de l’évaluation des besoins culturels. Elles permettent également de trouver des réponses souples et adaptées entre les offres de service public de la culture et le soutien au secteur associatif.
Votre synthèse des activités associatives (des adhérents de la Fraap) montrent bien les qualités de cette souplesse puisqu’elles proposent des actions de médiation, d’éducation artistique, d’ateliers de pratiques amateurs... et même des actions d’insertion. Ce constat renforce mon sentiment que la culture de proximité, en partie celle que mettent en œuvre les collectifs d’artistes, a à voir avec l’économie sociale et solidaire, qui est une des propositions fortes de mon programme.

Mais le développement des politiques culturelles ne peut reposer sur l’engagement fragile et aléatoire de quelques élus locaux et cela d’autant plus qu’il n’est pas rare qu’elles soient instrumentalisées comme outils de promotion des territoires ou de communication des élus. Il est de la responsabilité de l’État de garantir une égalité de « traitement » sur l’ensemble du territoire et de réaffirmer des objectifs clairs. Pour pérenniser l’action des associations, il est indispensable de mettre en place des conventions pluriannuelles qui pourraient être un véritable outil de partenariat, multi parties, et donc participer à la coordination des interventions de l’Etat et des associations.

Le respect du droit de présentation dans les lieux publics ou associatifs subventionnés est à mes yeux essentiel, il permettra de franchir les premiers pas d’une rémunération des plasticiens. D’ailleurs les Verts veulent faire respecter ce droit au sein leurs collectivités et ils ont déjà obtenu sa mise en œuvre à Paris. Et, à mon sens, le Ministère de la Culture devrait inciter les collectivités à respecter ces principes en s’engageant lui-même à leur côté dans le conventionnement des lieux qui appliquent ce droit de présentation. Il devrait aussi encourager la mutualisation des outils de service public (salles de spectacles, musées, centre d’art...) pour en faire des lieux mieux partagés et aider le développement du secteur de l’économie sociale dans le secteur culturel (coopératives, SCIC...).

Dans le contrat écologique que je présente aux Français la définition d’un label « d’économie sociale et solidaire » et la création d’un livret A solidaire bonifié, me paraissent également adaptées au secteur associatif culturel que vous représentez. Nous pourrions également inciter, par des exonérations fiscales, les citoyens à financer volontairement la culture par la mise en place d’un “micromécénat citoyen” permettant le soutien à la création et à la diffusion d’œuvre, au travers de dons fait à des associations ou structures à but non-lucratif.

Enfin, pour finir par la question de l’emploi culturel, nous demanderons dès la prochaine mandature le lancement « d’États Généraux du financement de la création et de l’emploi culturel » rassemblant l’ensemble des partenaires afin, en particulier, de sortir par le haut de la crise liée à la réforme de l’intermittence du spectacle et de l’audiovisuel, mais aussi de poser de nouveaux principes de rémunérations des artistes non salariés (plasticiens, écrivains...).

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, mes meilleures salutations.